Le relief actuel des Cévennes et des garrigues a été et continue d’être modelé par les évènements géologiques.

 

 Les rivières qui traversent la commune l’Avène et le Gardon d’Alès prennent leur source dans les Cévennes. L’Avène prend sa source à Laval-Pradel, il a une longueur de 29.7km et il se jette dans le gardon d’Alès à Saint Hilaire de Brethmas. Le Gardon d’Alès prend sa source près de Saint-Privat-de-Vallongue et mesure 61km (Fig.1), il rejoint le Gardon d’Anduze à Vézénobres pour former le Gardon.  Ces cours d’eau, qui ne mesurent que quelques dizaines de kilomètres de longueur, s’écoulent à travers des dénivelés approchant les 500 mètres. Ce réseau hydrographique emprunte les vallées découpées dans les schistes cévenols puis les canyons creusés dans les calcaires des garrigues (Fig.1). Dans les reliefs calcaires, des karsts se sont formés en raison d’un réseau hydrographique essentiellement souterrain, donnant naissance à de nombreuses cavités comme des grottes, des gouffres, des résurgences et des canyons. Ces reliefs sont d’abord le résultat de l’établissement du réseau hydrographique, puis de la surrection des Cévennes et des garrigues.

Fig.1 La vallée du Gardon d’Alès près de sa source dans les Cévennes à Saint-Privas-de-Vallongue et les gorges du Gardon dans les garrigues à Sainte-Anastasie

 Le document ci-dessous (Fig.2) permet de situer les évènements qui ont façonné le relief dans l’échelle des temps géologiques. Appréhender le temps en millions d’années est complexe, c’est pourquoi ce document met en perspective ce temps par rapport à une journée de 24h depuis la formation de la terre.

La mise en place du réseau hydrographique :

 

La distension débutée il y a 34 millions d’années a engendré le fossé d’Alès, mais aussi un réseau de failles actives avec une géométrie en escalier vers le Sud. Ces failles sont à l’origine de l’effondrement de la chaine Pyrénéo-provençale et de l’ouverture du golfe du Lion. (Fig.3)

Ce rifting ou affaissement, dû à un étirement, constitue un épisode majeur de différenciation entre la Plaine Littorale qui s’enfonce, sa surface se retrouvant au niveau de la mer et les Cévennes qui sont soumises à une surrection. Cependant, l’érosion est locale, elle n’affecte que les falaises situées le long des failles actives mais pas les reliefs cévenols. Le réseau hydrographique des Cévennes vers le Rhône et la Méditerranée se met en place au cours de ce rifting.

Fig.3 Paléogéographie de l’Europe et schéma des Cévennes au garrigues au moment du rifting, il y a 30Ma

Cet étirement conduit à l’ouverture de la mer Méditerranée avec la rotation du bloc Corso-sarde, il y a 20 millions d’années, cette mer envahit la future vallée du Rhône et remonte dans les vallées à l’Est du département (Fig.6).

La couverture calcaire[1] des Cévennes est érodée et les micaschistes[2] et les granites[3] sont soumis à leur tour à l’altération et à l’érosion. Un réseau hydrographique transporte les alluvions vers la vallée du Rhône et le golfe du Lion. Dans le bassin de l’Uzège, (Fig.4) des roches formées de sables, argiles, graviers, associés à des débris de coquilles de mollusques comme les Saint-Jacques, de dents de requins et de poissons (Fig.5)  témoignent d’une sédimentation dans une mer peu profonde accompagnée d’apports fluviatiles. Cette roche appelée molasse du Miocène est emblématique, elle a été utilisée pour construire de nombreux ouvrages historiques de notre département dont le pont du Gard.

[1] Le calcaire est une roche sédimentaire facilement soluble dans l’eau et qui se compose principalement de calcite ou carbonate de calcium

[2] Les micaschistes sont des roches métamorphiques à forte foliation, riches en micas

[3] Le granite est une roche dite plutonique à texture à gros grains, résultant du refroidissement lent du magma en profondeur.

Fig.4 Carte géologique de l’est du département avec l’avancée de la mer il y 20 millions d’années.

Fig.5 Représentation d’un artiste Nicolas GAL: requin et coquilles saint jacques dans la mer, il y a 20 Ma

Fig.6 Paléogéographie de l’Europe et schéma des Cévennes au garrigues au cours de l’ouverture de la mer méditerranée il y a 20Ma

La surrection des Cévennes et des garrigues

 Il y a 10 millions d’années, la surrection paroxysmale des Alpes entraîne le soulèvement du Massif Central et la baisse du niveau marin, ce qui s’accompagne d’une reprise de l’érosion. Cette élévation est responsable de l’incision des vallées cévenoles et du relief karstique de la bordure cévenole et des garrigues.  La mer a définitivement quitté l’Uzège et la vallée du Rhône. (Fig.7)

Fig.7 La paléogéographie de l’Europe et schéma des Cévennes aux garrigues lors de la surrection des Alpes, il y a 10 millions d’années

Toutefois, ces réseaux karstiques possèdent des conduits profonds qui se développent plus de 100 mètres en dessous du niveau actuel des vallées. La formation de ce réseau profond est la conséquence d’une baisse importante du niveau de la mer au-dessous de l’actuel qui s’explique par l’assèchement de la mer Méditerranée. À partir de -5,9 millions d’années, par une combinaison de mouvements tectoniques, convergence des continents africain et européen ainsi qu’une chute significative du niveau général des océans, le corridor de Gibraltar, seule connexion entre la mer Méditerranée et l’océan Atlantique, a été momentanément fermé. Cela a provoqué un défaut d’alimentation en eaux marines de la Méditerranée entrainant une évaporation de cette dernière. Le niveau d’eau s’abaisse de plus de 1 500 m, les géologues parlent de crise messinienne. Il y a 5,3 millions d’années, la réouverture du détroit et la remontée du niveau général des océans permet aux eaux de l’Atlantique de franchir en nouveau le détroit de Gibraltar, la mer envahit les vallées. La Méditerranée était alors plus étendue, son niveau était de 80 m au-dessus de l’actuel, la mer s’étendait au sud de Nîmes, les argiles et les sables déposés permettent de reconstituer son extension.

Fig.8 Schéma du réseau karstique actuel

Depuis 3 millions d’années, le climat se refroidit et périodes froides (glaciaires) et tempérées (interglaciaires) s’alternent, avec une variation de température de 6 à 8°C. Actuellement, nous nous trouvons dans la dernière période interglaciaire, celle de l’Holocène, qui a débuté il y a seulement 12 000 ans. L’érosion des versants et l’incision du réseau hydrographique se poursuit, grâce aux multiples abaissements du niveau de la mer en moyenne de -100 m pendant les périodes glaciaires. En période glaciaire, les eaux venant du front glaciaire, en amont, transportent une grande quantité de matériaux qui se déposent dans le lit des rivières. En période interglaciaire, les eaux de fonte creusent ces dépôts, formant ainsi des terrasses alluviales.

Au bord du Gardon d’Anduze, les alluvions (FV : -5.2 à -1.2 Ma) les plus anciennes représentées par des galets et des cailloutis hétérogènes, forment des terrasses perchées entre 100 et 60 m au-dessus du cours d’eau actuel, principalement sur la rive droite entre Tornac et Moussac. Les formations alluviales au sein desquelles se situe le lit des Gardons sont organisées en terrasses emboîtées[1]. Ces basses terrasses sont composées d’alluvions anciennes (Fy et Fy-z : -115 000 à -11 700 ans) et surtout les alluvions récentes holocènes (Fz : -11 700 ans à l’actuel) composées de galets, graviers, sables et limons. Il y a que des alluvions récentes dans le lit du Gardon d’Alès.

[1] Les terrasses alluviales emboîtées se forment lorsque le creusement est moins important que la phase d’alluvionnement, les alluvions des différentes périodes se déposent les unes sur les autres

Fig.9 Carte et coupe dans les terrasses alluviales du Gardon

C’est dans les alluvions fluviatiles les plus anciennes (FV : -5.2 à -1.2 Ma), dans la commune de Durfort, qu’un gisement de fossiles avec plusieurs mammouths (Elephas meridionalis) a été mis à jour. Un de ces fossiles est exposé aujourd’hui à Paris dans la galerie du Muséum d’histoire naturelle, il est daté de 1,5 million d’années. Durant cette période interglaciaire les mammouths méridionaux colonisaient l’Europe.

Allez sur le site pour écouter l’histoire de ce mammouth.

Fig.10 Squelette du mammouth de Durfort au Muséum d’histoire naturelle de Paris

Fig.11 Paléogéographie du dernier maximum glaciaire il y a 20 000 ans

Les cartes du monde et de l’Europe ont été construites à partir des données de Christopher Scotese et de l’ATLAS Péri-TETHYS.

Les karts et les alluvions sont nos réservoirs d’eau potable 

 Ces alluvions sont favorables à la formation de réservoirs en eau, la rivière est en relation directe avec la nappe phréatique[1] qui la draine ou l’alimente suivant son débit. Des captages sont réalisés dans ces alluvions pour alimenter en eau potable les communes situées le long du Gardon. À l’entrée des gorges du Gardon à Dions, il n’y a plus d’alluvions déposées, l’eau s’infiltre dans le calcaire récifal, entrainant l’assèchement du cours aérien du Gardon en période d’étiage. Il retrouve un écoulement permanent à partir des importantes sorties d’eau ou résurgences situées en aval du Pont-Saint-Nicolas et jusqu’à Remoulins. L’eau s’infiltrant dans les réseaux karstiques, ces réseaux constituent d’autres aquifères exploités pour notre alimentation en eau.

[1] La nappe phréatique est une couche souterraine contenant de l’eau, située dans les espaces interstices des roches et sédiments, dont la surface est appelée la surface phréatique et qui alimente en eau potable différents puits et sources.

Fig.12 Carte des aquifères sur le bassin versant des Gardons (modifiée d’après EPTB des Gardons)

 Durant la préhistoire, les hommes et les animaux ont habité les grottes et les abris sous roche.

Au cours de la préhistoire[1], au Paléolithique[2] (-2 000 000 ans à -9 600 ans) des Hommes appartenant à trois espèces du genre Homo[3] (Homo heidelbergensis, Homo neanderthalensis puis Homo sapiens) ont occupé les abris sous roche et les grottes creusées par les eaux d’infiltration dans le calcaire récifal des garrigues, surtout dans les gorges du Gardon et de l’Ardèche. Les dépôts sédimentaires de plusieurs mètres d’épaisseur permettent d’identifier plusieurs niveaux montrant que les grottes ont été habitées durant plusieurs périodes archéologiques.

Les ossements des Hommes et les traces de leurs activités, outils, feu, peintures etc…témoignent de leur présence. Les ossements des animaux et les peintures rupestres permettent d’identifier le climat glaciaire ou interglaciaire de la période préhistorique. Par exemple, les grottes de Bragassargues dans le bois de Lens ont été occupées au paléolithique moyen (-300 000 à -40 000 ans) par les Néandertaliens. Les grottes de Balauzière, de Latrone, et des Colonnes (ou de Bayol) dans les gorges du Gardon, ont été habitées au paléolithique supérieur (-40 000 à -9600 ans). Des outils variés en ossements et silex ainsi que des peintures sur les parois témoignent de la présence des Homo sapiens. Très souvent ces grottes ont été utilisées jusqu’au Néolithique[4].

[1] La préhistoire c’est la période qui commence au moment où se développent les premiers représentants du genre Homo et qui se termine quand les hommes utilisent l’écriture. C’est donc une période aux bornes « variables » suivant les régions.

[2] Le Paléolithique est la première et la plus longue période de la Préhistoire, débutant il y a environ 3,3 millions d’années avec l’apparition des premiers outils lithiques en Afrique, et se terminant il y a environ 11 700 ans avec la fin de la dernière période glaciaire. Son nom, issu du grec ancien, signifie « âge de la pierre ancienne ».

[3] Homo est le genre qui réunit Homo sapiens et les espèces apparentées. Depuis quelque 2,5 millions d’années, le genre Homo a produit un buissonnement d’espèces, en raison de sa dispersion géographique. Toutes les espèces du genre Homo sont aujourd’hui éteintes sauf Homo sapiens donc nous ! Les dernières espèces apparentées, comme Homo heidelbergensis et Homo neanderthalensis, ont disparu il y a entre 50 000 et 30 000 ans.

[4]Le Néolithique est une période préhistorique marquée par de profondes mutations techniques et sociales, liées à l’adoption, par les groupes humains, d’un modèle de subsistance fondé sur l’agriculture et l’élevage. Les principales innovations techniques de cette période sont la généralisation de l’outillage en pierre polie, la poterie, le tissage, ainsi que le développement de l’architecture.

Fig.13 Peinture rupestre de la grotte de la Baume Latrone « Mammouth à trompe enroulée » ©JL Roudil (Photographie faite dans le musée Préhistorama)

Carte interactive de la situation des grottes autour du Gardon dans le calcaire récifal.

Frise chronologique du Paléolithique à aujourd’hui : https://frise-chronologique.inrap.fr/

La planète a connu son dernier maximum glaciaire jusqu’à -21 000 ans, avec une température moyenne de 8°C contre 15°C actuellement. Il y a -12 000 ans commence l’Holocène, une époque géologique interglaciaire. Les préhistoriens définissent de nouvelles périodes, le Mésolithique (-9 600 à -6 000 ans) où un environnement tempéré s’installe puis le Néolithique (-6000 à -2300 ans) qui marque l’apparition de l’agriculture, de la domestication des animaux, et de la construction de villages. Au Néolithique final, la colline de La Rouquette était occupée par des agriculteurs-éleveurs, plus ou moins sédentarisés. La grotte située sous le mas de la Rouquette fut utilisée et aménagée par les Hommes du Néolitique.

Si vous êtes curieux et intéressés par la préhistoire, vous pouvez visiter : le Musée Préhistorama de Rousson, qui présente 40 dioramas, des scènes reconstituées de la vie préhistorique avec des hommes et des animaux grandeur nature, le Muséum d’histoire naturelle et de préhistoire de Nîmes, le Musée de la Grotte Chauvet, le Musée de la Cité de la Préhistoire situé à Orgnac-l’Aven, et plus loin le Musée de Tautavel. Un site https://www.hominides.com donne de nombreuses informations sur la Préhistoire et l’évolution de l’Homme.

 Les scientifiques ont récemment attribué un nouveau nom pour caractériser l’époque géo-climatique actuelle ; ils ont établi une nouvelle période géologique intitulée l’Anthropocène. Cette époque souligne l’influence de l’homme sur les perturbations environnementales contemporaines, le réchauffement climatique, et la disparition rapide des espèces qui entraîne une réduction de la biodiversité. Depuis le début du XIXe siècle, avec la révolution industrielle, cette transformation s’est intensifiée. Les prédictions du GIEC sont inquiétantes, la température pourrait grimper de 2°C à 6,4°C d’ici à la fin du siècle si des mesures importantes de diminution des gaz à effet de serre ne sont pas mises en place. Les répercussions sur l’humanité soulèvent des inquiétudes concernant sa santé, sa nutrition et son accès à l’eau.

Rédaction et cartes : Claudie HUGUET-CARMONA