La mer se retire, un isthme se forme précédant les premiers plissements pyrénéens

 

La mer s’est retirée vers l’Est. Dans les vallées situées à l’est du département se sont déposées des roches qui traduisent encore la présence de la mer après -125 millions d’années. Des roches datées, entre – 125 et – 83 millions d’années révèlent des fluctuations du niveau de la mer, alternant entre phases de retrait (régression marine) et phases d’avancée (transgression marine).

Le document ci-dessous (Fig.1) permet de situer ces évènements dans l’échelle des temps géologiques. Appréhender le temps en millions d’années est complexe, c’est pourquoi ce document met en perspective ce temps par rapport à une journée de 24h depuis la formation de la terre.

Fig.1 : L’échelle des temps géologiques en millions d’années

Fig.2 : Carte des affleurements des roches d’origine marine au cours du Crétacé, permettant de localiser les limites des avancées de la mer à l’est du département au crétacé supérieur. Réalisée avec Géoportail.

La combinaison de conditions chaudes et humides avec les variations du niveau de la mer est responsable de la création de roches utiles à l’Homme, telles que la kaolinite (une argile blanche employée dans la céramique), les argiles ferrugineuses qui sont chargées en fer, les ocres (un mélange d’oxydes et d’hydroxydes de fer, de kaolinite et des particules de quartz) ainsi que les sables siliceux blancs (des particules de quartz utilisées pour fabriquer du verre).

Durant cette période géologique, la bauxite (un minerai riche en hydroxydes d’aluminium) s’est également formée. Sur un continent émergé, un riche couvert végétal se développait sous l’effet de conditions climatiques tropicales humides. Les granites et micaschistes des Cévennes, ainsi que les marnes, sont altérés et érodés. Les produits de cette altération ont été déplacés et piégés dans des karsts[1] où les oxydes d’aluminium formés se sont accumulés.

L’alumine est extraite de la bauxite, par un processus industriel qui a commencé en 1860 dans l’usine de Salindres. L’alumine est le principal matériau utilisé pour produire de l’aluminium. Cette production génère un déchet connu sous le nom de boues rouges. À Salindres, les boues rouges ont été entreposées dans le lac de Ségoussac, situé dans la commune de Rousson. Actuellement, ce lieu a été réhabilité.

[1] Le karst est un paysage formé par l’érosion de roches calcaires par l’eau, qui crée des grottes, des rivières souterraines et des dolines.

Fig3 : Affleurement des ocres à Cornillon (nord-est du Gard) et de bauxite dans un karst à Bédarieux (34).

 

La localisation de ces roches définit durant cette période géologique une zone d’émersion orientée d’ouest en est entre les Cévennes et la Provence, « l’Isthme Durancien » qui présente une longue étendue de 500 km et une altitude moyenne de 200 à 500 m. Cette surrection a entraîné des processus d’altération et d’érosion qui sont à l’origine des gisements de bauxites et d’ocres.

 

La formation de cet isthme découle de l’ouverture de l’océan atlantique Nord. Son expansion a entrainé la rotation de la plaque ibérique provoquant la formation de la gouttière pyrénéo-provençale, et sur le bord Nord de ce fossé, un bombement formant l’isthme durancien. Notre département était situé sur sa limite nord. L’ouverture de l’océan Atlantique sud provoque la remontée de l’Afrique et la compression. (Fig.4).

Fig.4 : Paléogéographie, il y a 90 millions d’années au moment de la formation de l’isthme durancien

De -83 à -65 millions d’années, les affleurements rocheux sont très réduits. On y trouve des sédiments fluviatiles et lacustres (argile, sable, gravier) contenant les fossiles des derniers dinosaures. Dans le département du Gard, le seul gisement identifié se trouve à l’est de Saint Bauzély. Il s’agit du gisement du Champ-Garimont, daté entre -75 et -70 Ma. En 1932, un facteur passionné de géologie du nom de Saturnin Garimont l’a découvert. Des recherches menées par des paléontologues ont mis en évidence sur ce lieu divers fossiles, d’algues vertes lacustres (charophytes), d’escargots, de poissons, d’amphibiens, de reptiles y compris des restes de dinosaures. On y a également trouvé deux molaires appartenant à une nouvelle espèce de mammifère primitif dénommée « Labes Garimondi ».

 

Ces fossiles sont exposés au Musée Garimont à Fons dans la vitrine 3.

Fig.5 Ossements : vertèbres et fragments d’os longs de dinosaures photographiés au Musée Garimont de Fons avec l’autorisation du conservateur.

D’autres gisements de dinosaures datés de la même période ont été découverts en Occitanie avec leurs musées associés : à Villeveyrac dans l’Hérault et à Espéraza dans l’Aude.

Fig.6 Représentation d’un artiste Nicolas Gal : dinosaure herbivore de l’ordre des Iguanodontidés et premiers petits mammifères ayant vécu en Occitanie, il y a 80 millions d’années

Fig7 : Carte localisant le gisement de fossiles du Champ Garimont

À la fin du Mésozoïque (ou ère secondaire), les terres émergées étaient parcourues par des fleuves et des rivières et parsemées dans les parties basses de grands lacs et de marécages. Les sédiments accumulés se sont transformés en marnes, avec des couches de calcaires lacustres renfermant des fossiles, y compris ceux des derniers dinosaures. Il y a 65 millions d’années, tous les dinosaures ont disparu, ainsi que d’autres espèces, suite à une crise biologique de portée mondiale. Deux hypothèses principales pourraient expliquer cette extinction : l’impact d’une météorite et une activité volcanique intense, ou peut-être même la combinaison des deux phénomènes.

Les terres émergées en Occitanie résultent de l’ouverture de l’océan l’Atlantique Sud et de son expansion qui provoque un déplacement vers le nord de l’Afrique, conduisant à la fermeture de l’océan Téthys Ligure et aux premiers plissements de la compression pyrénéo-provençale orientée E-SE, W-NW.

Fig8: Paléogéographie, il y a 65 millions d’années

Les cartes du monde et de l’Europe ont été construites à partir des données de Christopher Scotese et de l’ATLAS Péri-TETHYS.

 

Depuis le sommet de la Coste, il est possible d’observer à l’est une dépression couverte de « terres rouges et jaunâtres ». Ces roches se sont constituées durant l’épisode des plissements pyrénéens.

 

Rédaction et cartes : Claudie HUGUET-CARMONA